lundi 16 janvier 2017

ALEXANDRA Traversée Cape Town-Ste Hélène, 7 au 16 Janvier 2016

Nous sommes arrivés ce 16 janvier 2017 à Sainte-Hélène !!
Beaucoup de problèmes d'Internet sur Sainte-Hélène, j'espère que les articles de Lionel et moi vont bien être publiés sur le blog de Bluenote.
L'équipage de Bluenote vous salue. En attendant nos prochaines impressions... 
Rédigés en mer:

Du voyage annoncé

Après la traversée de l’Indien et l’arrivée sur l’Afrique du Sud en franchissant le cap des Aiguilles puis de Bonne Espérance (dans les rudes conditions relatées par les 2 Publishers actuels, Lionel et Alexandra), Bluenote s’attaque à sa 2ème grande traversée, celle de l’Atlantique Sud.
Une seule escale sur notre route : Sainte-Hélène, petite île de funeste mémoire pour les corses. A découvrir, le plaisir du marin à venir, la terre aperçue et l’escale qui se profile après une dizaine de jours de navigation.
La traversée suivante partira de cette île minuscule au milieu de l’Atlantique Sud pour atterrir au Nord Est du brésil, à Joa Pessoa, à la marina de Jacaré de notre ami Francis. 




Du départ d’une transat Sud

Le départ, une 1ère fois retardé de 24h pour cause de météo, faillit ne pas avoir lieu au matin du samedi 7 janvier du fait de notre nouvel ami, le lion de mer.



Vautré sur les cordages nous arrimant au ponton depuis la veille au soir, il grognait dès que nous l’approchions. Ouvrait un œil las pour nous signaler qu’il  surveillait son périmètre de sécurité malgré l’état de somnolence prolongée qu’il nous offrait depuis la veille. Des vents de plus de 60 nœuds dévalant de la Table Mountain nous avait bloqués, c’était sage de notre part mais face au lion de mer il nous fallait faire preuve de courage. Notre capitaine dépité par notre couardise descendit sur le ponton et bravant l’énorme masse de la bête, pas encore rassasiée de sommeil après, pourtant, une nuit entière sans bouger sur notre ponton, l’en chassa avec force cris et gestes. L’animal manifesta sa colère et son mépris de l’importun en dressant son corps (comme pour y faire tourner un ballon sur son nez… beau dommage, elle n’en avait point) et mit en mouvement vers l’eau sa masse qui y glissa sans une éclaboussure sous les vivats de l’équipage conquis par le courage de son capitaine, donc confiant pour la suite.



Du diable ou de la météo à Cape Town

Cape Town c’est la Table Mountain. Une table. Immense. Aux flancs raides. Avec une particularité que nous avons éprouvée à plusieurs reprises et décrite comme suit par Michener dans L’Alliance (saga qui relate l’histoire de l’Afrique du Sud) :
" A de fréquents intervalles, par des journées sans nuages où le plateau du sommet était clair, un vent soudain, soufflant vers le Nord depuis l’Antarctique, soulevait une masse de brouillard très dense et l’on pouvait voir de ses yeux cette brume se répandre comme un écran dissimulant la Table Mountain.  "Le diable étale sa nappe" disaient alors les marins, car le haut de la montagne était caché, avec les bords du "tissu" retombant sur les côtés. "


Le jour de notre arrivée à Cape Town après l’éprouvant ( !) passage du Cape of Good Hope, la table était dégagée. Majestueuse. Protectrice. Ecrin où se niche la ville du Cap. Les 2 jours suivants, nous l’avons vue se couvrir et le vent en dévalait à plus de 60 nœuds. La température en très peu de temps passa de clémente à frisquette sous l’effet d’un vent glacial que Bluenote distribuait dans nos cabines par son système de ventilation intérieure. Résultat = 17°. Ce qui fut peu apprécié des équipiers.


De l’approvisionnement pour une traversée

On établit des listes après avoir fait un état des stocks, on écrit des menus pour une semaine, on en extrait les quantités à acheter par de savants calculs et on part, en bandes, dans les Malls repérés comme bien achalandés. Et on démarre, chacun à la barre d’un caddie, listes en mains, nos achats. Qui deviennent vite et de façon anarchique, car fatigue et faim surviennent, achats compulsifs de gâteaux secs pour l’un, pots de moutarde supplémentaire pour l’autre, quand le 3ème avise soudain un rayon entier de barres de céréales qui pourraient être utiles, l’angoisse de la traversée l’étreignant soudain, il faut alors le rassurer mais l’angoisse étant contagieuse, qui osera affirmer qu’on ne manquera de rien…personne, et pendant ce temps le 4ème baguenaude en mettant dans son caddie des denrées nullement répertoriées par l’équipage et en quantité insuffisante pour une traversée d’au moins… 10 jours puisqu’à Ste-Hélène, il y aura surement une épicerie ou deux !
NDR : Toute ressemblance entre les substances relatées et les goûts des membres de l’équipage est fortuite.
Les appros et les anxiétés alimentaires de ses équipiers, ça fatigue le capitaine !!

Après cet épisode épique de l’appro, il faut le monter à bord ce qui signifie mettre des caisses de bouffe et boissons dans l’annexe qui va parcourir quelques  centaines de mètres dans une mer démontée par des vents soufflant à plus de 45 nœuds : le tout arrive trempé d’eau de mer (ohhh noooooooon) et il faut le caser dans les coffres du bord. Et garder en mémoire la place de chaque denrée….

D’un autre type d’appro !

Matin du 2ème jour : A l’aube de ce chahut maritime, nul sentiment océanique mais la pêche du jour ! Dans le trempoline et au pied de mât, un poisson volant et un couple maman-bébé calamar. Dont l’encre expulsée dans un ultime sursaut de défense devant l’inéluctable créa une composition abstraite intéressante :

Composition… à l’encre !


De la pêche ou comment survit l’équipage

Exemple extrait de mon journal de bord du 12 janvier : Pendant que je préparais notre déjeuner, confiant à Lionel le rôle quasi honorifique de couper, pour l’apéro, LA saucisse corse (= saucisson pour les pinzuti) apportée de Corse pour notre traversée, un des 2 moulinets de nos cannes à pêche installées dès notre réveil s’est déclenché. Vif espoir d’un repas avec du poisson frais pêché. Très vite l’espèce du poisson nous fut révélée : une dorade coryphène. L’excitation monte, Georges et Alain sont à poste pour fatiguer tout en la remontant la bête. Lionel et moi hésitons à préparer le croc, la planche et le couteau à découper, par superstition. Et soudain, Georges me crie : " l’appareil photo " ! wouahhhh ! Ça signifie qu’il est certain de la remonter celle-là !


Après avoir pris quelques clichés de la prise, Lionel et moi rentrons en cuisine : saladier, jaune d’œuf, du sel de céleri et le jus de plusieurs citrons verts, tout est prêt pour accueillir -et y cuire- les filets de dorade prélevés par Georges sur la jupe (du bateau, pas la mienne) une fois que je les ai découpés en petits cubes. Le tout a pris à peine 20mn. Notre apéro fut encore meilleur que les
précédents car accompagnés des effluves gustatifs de la saucisse corse et du futur tartare de dorade qu’une petite demi-heure dans sa marinade suffira à cuire à point.


De l’activité à bord

Les manœuvres. Beaucoup, parfois. Ainsi pendant cette traversée, le matin le spi est installé. Le vent qui souffle de l’arrière sans être constant oblige à faire plusieurs empannages (=changement de bord) de la grand-voile, parfois même du spi. Une survente prolongée et le spi doit être affalé. Il le sera dans tous les cas pour la nuit où le capitaine, pour le confort de son équipage, réduit la toile.






  
 



La lecture




La confection de " Mappâts " pour la pêche (avec un doigt de gant Mappa !)





De l’eau de mer

OUI, on vit au milieu de la mer, avec la mer, grâce à la mer et pour la mer, mais NON, l’eau de mer, à bord, n’est pas notre amie. Quand elle s’insinue, s’infiltre, se faufile, se répand, se dépose, s’embarque à l’intérieur du bateau, elle en est indélogeable. On croit que ça sèche mais dès que l’hygrométrie monte, elle suinte des coussins, des draps, des serviettes, de tout ce qui en aura été imprégné….. malgré les mises en garde du capitaine.

De l’absence..

Parfois l’absence de ceux qu’on aime étreint l’âme. Aujourd’hui 13 janvier c’est l’anniversaire de ma Bobinette, ma mère : 94 ans et je ne pourrai pas l’embrasser, lui redire que je l’aime. Alors je le lui écrirai de Sainte-Hélène.


Du souvenir… ou pas

Sur Bluenote je retrouve des automatismes acquis pendant nos 7 années sur Matiti. Mais je n’avais jamais navigué plus de 3 ou 4 jours d’affilée. Et toujours en famille, avec mon Georgio, notre fille Marthe... et Vela ! NDR : notre chienne !
Cette traversée constitue donc une grande première.

De façon lapidaire, je peux dire que ça me plaît.
Bien sûr, car je savais que je le penserai, je me suis très vite dit : Qu’est-ce que je suis venue faire dans cette aventure et comment Georges supporte-t-il de vivre tout ça depuis des mois ???
Il faut dire que les 2 premières journées ont été parcourues avec 35 à 40 nœuds de vent, on naviguait entre 10 à 15 nœuds (240 MN en 24H le 1er jour, en réduisant pourtant beaucoup la nuit. Pour ceux qui n’ont pas de connaissance sur le sujet, c’est beaucoup 240 MN en 24h).

Donc ça me plaît. Pourtant : Il y a juste de l’eau, de la mer, de l’océan. Agité, super agité, avec des vents entre 25 et 35 nœuds, souvent 40. On se fait chahuter, bousculer, rincer, secouer, balloter, bringuebaler d’un bout à l’autre du cockpit ou du carré, c’est super inconfortable et assez pénible pour tout dire. Ace jour mon corps est plus bleui que bronzé ! En plus il fait froid, le cockpit comme tout le reste du bateau se fait sans cesse recouvrir au minimum d’embruns sinon de baquets d’eau jetés violemment et brutalement par … ?? suis-je déjà en train d’halluciner ? après seulement quelques heures de navigation, c’est inquiétant que j’imagine une entité à nos côtés qui nous balancerait des seaux d’eau de mer !

Nulle angoisse ne m’a étreint quand après 5h de navigation, nous avons perdu tout repère visuel terrestre. Il n’y avait que la mer et très, très peu d’animations en mer. A partir du 3ème jour, le vent s’est calmé. Georges nous forme petit à petit aux manœuvres. Je m’occupe avec plaisir de la cuisine. On joue, on rigole, on lit, on écrit, on écoute de la musique, on mange, on boit, on lit, on rêve, on discute, on ressent les éléments qui nous entourent, on inspire l’immensité et sa solitude, c’est inédit.

Bilan : A l’aube du 9ème jour je me sens comme devant une œuvre dont je pressens l’intérêt mais sans pouvoir en dire plus, ni encore analyser cet intérêt et mes sensations, il me manque le recul. « C’est intéressant ». En effet. C’est ce que je pense. Mais j’en suis qu’à la phase de la contemplation. Comme devant une œuvre inédite, j’observe.
J’ai appris à Marthe, depuis son plus jeune âge, à dire pourquoi elle aimait ou n’aimait pas une chose, que ce soit un livre, un film, une personne, une situation. Pour dépasser ce seul stade du j’aime ou j’aime pas. Devant cette traversée de 9 jours, je me sens devant cette tâche : développer ma sensation, la préciser, en percevoir les composantes.

Anyway, ce qu’exprime cette belle photo de Georges sera l’une de ces composantes :







De l’arrivée à Sainte-Hélène : Impressions à venir ?

" Un rocher lugubre battu par les flots et les vents ".
La chambre noire de Longwood : Impression de J-P Kauffmann, un journaliste.

" Une grosse bague en bronze, rehaussée d’une émeraude, qui sort de la mer. " Impression de Brigitte Murphy Couët, une âme d’artiste.

Stay tuned pour avoir la nôtre !



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