mercredi 17 août 2016

C'est parti pour l'Indien !!



Bali c’est fini, Georges et Bluenote, avec ses 2 équipiers Alain et Jean-Pierre, se sont élancés pour la traversée de l’Indien, le 16 août au matin, après un ultime papier à faire signer par les autorités de clearance, visitées la veille. Moi je suis rentrée en France. A peine débarquée à Roissy, j’ai eu d’un seul coup la sensation de me rétrécir, de me dessécher, avec la peau qui craque, qui tire, sur le visage, les jambes, les bras. Désagréable ressenti dû à la moindre humidité dans l’air en France que sous les tropiques. Ou bien était-ce d’avoir quitté à nouveau Georgio pour plusieurs semaines..

Donc j’ai débarqué et ils ont pris la mer. Trois hommes : un capitaine, 2 équipiers. Arrêt sur image : 


Chacun avait hâte de s’élancer, en rêvait. Aucun des trois n’aurait pu imaginer, il y a 9 mois, faire cette traversée, même pas Georges qui ignorait alors qu’il achèterait un bateau si loin de Sète et qu’il lui faudrait l’y ramener. Alain fait du bateau depuis toujours mais dans les eaux méditerranéennes où un port n’est jamais guère plus loin qu’1 ou 2 jours de mer. Jean-Pierre n’a du voilier que l’expérience, certes inoubliable, faite avec Georges, et Thierry, lors d’une virée à Barcelone il y a 2 ans. Qui lui avait donné le goût du bateau, d’apprendre à le manœuvrer pour un jour, pourquoi pas, emmener sa douce Édith sur les flots par lui-même. Alors devant cette expérience, inimaginable pour lui jusqu’à ce que Georgio lui parle de son projet et qu’il y adhère, il se souvient et fait le point :

"J'ai déjà vécu des traversées un peu longues. Entre Chypre et l'Egypte à bord de l'Esperanza de Greenpeace : trois jours de mer guère plus, à petite vitesse le long des côtes du Liban et d'Israël avant de découvrir, émergeant des brumes de chaleur, Port Saïd la trépidante. J'ai navigué, sans autre but que de traquer les bancs de thons rouges, du sud au nord de la Sardaigne et dans le golfe de Syrte d'où nous nous fîmes sortir manu militari, en pleine nuit, par des garde-côtes Libyens pour le moins peu amène. Je sais donc de quel poids pèse le temps quand rien ne le borne pas même un paysage qui défile, quand il s'écoule sans autre repère que les minutes et les heures au cadran de la montre ou que la course du soleil sur la courbe du ciel. Il faut alors accepter de se mettre au ralenti, faire taire ses impatiences, goûter l'instant comme il vient, comme il s'offre, goûter la vie dans ce qu'elle a de plus banal et en même temps de plus grandiose. Car tout de même, traverser l'Indien, ce n'est pas rien ! "


Alors cette traversée de l’Indien qui vient de débuter, chacun s’y préparait à sa façon. Pour Georges primait la préparation du bateau, avec ses dernières vérifications à effectuer, par exemple aller en haut du mât inspecter l’état de la dernière réparation effectuée :


Il y a aussi l’état du bateau, de ses coques, qui vont le porter, il faut qu’elles soient propres pour que l’eau y glisse sans effort.

"Les voiliers sont comme des chevaux de course. Il faut les bichonner avant l’épreuve et la grande épreuve qui attend Bluenote à travers l’Indien veut qu’on le ménage. J’ai donc plongé le long de ses flancs dans l’eau chaude du lagon avec Alain et Captain Georgio pour redonner du lustre à son étrave. Je ne savais pas que les bateaux avaient besoin qu’on les caresse ainsi. Il y a sans doute un petit cœur qui bat dans la grand-voile."

Les jours précédents, Georges a briefé ses équipiers sur les équipements du bord :

"Security first ! Tout y passe : la perche de l’homme à la mer, la bouée couronne, le bateau de sauvetage, la réserve de survie, (le radeau de survie NDT) les différentes balises, les fusées de détresse, l’alerte « piraterie »... Du rêve à la réalité. La traversée de l’Indien entre l’Indonésie et les Mascareignes sur près de quatre milles marins, n’est pas une simple course onirique sur l’océan des pensées.

Puis il y a les voiles, la grand-voile, le foc, le gennaker, les cordages, les drisses, les bouts (prononcer "boutes" NDT) et leur code couleur ; il y a aussi les règles de la vie à bord, les procédures à respecter et enfin l’ « appro » qu’il va nous falloir faire : riz, nouilles, sauces, farine pour le pain, fruits et légumes... Un minimum de frais pour tenir dix jours avant d’atteindre l’archipel Coco Keeling, terre australienne où les autorités saisiront et détruiront tout ce qui n’aura pas été consommé. "

Jean-Pierre se remémore aussi les conseils prodigués à tout marin débutant sur un voilier pour une traversée, quelle qu’en soit la durée :

"  Edith ne cesse de me recommander de bien m'accrocher au bastingage lorsqu'il m'arrivera d'aller pisser par-dessus bord sous la voûte étoilée (ou pas) du ciel austral. On le lui a dit, on me l'a dit aussi : la plupart des hommes à la mer sont retrouvés -quand ils le sont- noyés, la braguette ouverte, surpris par le roulis ou le tangage, non pas au cours d'une manœuvre périlleuse mais en cet instant trivial où le corps impose ses nécessités. "

Voilà !! c’est donc parti pour Bluenote, ils ont largué les amarres il y a maintenant une trentaine d’heures. Chacun de nous pourra suivre leur course à travers l’océan indien grâce à la balise. Dont je rappelle le lien :
www.whatusea.com
login :
utilisateur : Bluenote
mot de passe : Delaporte
Précision : la vitesse indiquée par la balise n’est que celle du bateau à l’instant où le satellite relève sa position et non la vitesse moyenne sur la distance effectuée. De même que cette distance est celle entre deux points, tirés sur une carte, et non pas celle parcourue réellement. Certains d’entre vous en auront eu l’intuition en voyant par exemple ce trait tiré, passant au-dessus de la terre australienne !
Stay tuned car, oui, " tout de même, traverser l'Indien, ce n'est pas rien ! "

Alexandra, à Paris, le 17 août 2016.
 

4 commentaires:

  1. Merci Sandra pour ces nouvelles passionnantes sur ton retour à terre et le départ pour le grand large de Georges et ses deux équipiers. Quelle belle plume, pour les inconditionnels, çà peut rappeler le livre "Trois hommes et un bateau", notamment à propos du côté trivial de l'accident de braguette... Grosses bises à vous tous, çà fait rêver... Alexandre & Isabelle

    RépondreSupprimer
  2. Merci beaucoup pour ces nouveaux commentaires et ces informations fort utiles pour le béotien que je suis. Tous mes vœux aux navigateurs ainsi qu'à Sandra pour la reprise sur la terre ferme et européenne,
    Antoine Pitti-Ferrandi

    RépondreSupprimer
  3. Quand on lit ce texte, on voit défiler les images devant nos yeux, tel un film d'aventures qui nous emporte bien bisous loin d'ici et de nos préoccupations terrestres...on en profite pour vous passer le bonjour en vous souhaitant de bons vents favorables à nos prochaines retrouvailles.

    RépondreSupprimer